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C AM ILL E BERUBE 139 Il s'agit donc, à la lettre, d’une perception de la lumière qui fait voir avant celle des objets qu’elle fait voir. Cette conclusion est suivie d’une longue déclaration emprun­ tée toute entière et littéralement à Robert Grosseteste, sans aucun mot de commentaire de la part deGuibert, ni de mention de l’auteur. Cette déclaration est un exposé de la notion de la vérité comme adéquation du signe et de la chose signifiée. Ce signe est plus vrai que la chose elle-même, et il est plus vrai dans l’intelligence divine que dans l’intelligence humaine. Il suit de là que la vérité créée n’est rien d’autre que la conformité de la chose avec l’intelligence divine, et que la vérité créée ne peut être vue que si elle est vue dans la lumière de la vérité première. Mais comme on ne voit la vérité première que dans ses reflets dans les choses et comme unie aux choses, parce que cette lumière est trop forte pour être vue en elle-même, en raison de la faiblesse présente de l’oeil de l’intelli­ gence 2. C’est de cette façon, conclut R. Grosseteste, et Guibert avec lui, que les esprits impurs voient la vérité suprême, et que beau­ coup d’entres eux ne perçoivent pas qu’ils la voient de quelque façon, comme l’oeil qui ne se serait jamais tourné vers le soleil, ignorerait qu’il voit les corps dans sa lumière. Les coeurs purs ou parfaitement purifiés voient la lumière de la vérité in se, alors que les coeurs impurs ne le peuvent23. Faut-il traduire cet in se, comme l’équivalent de in se ipsam ou comme in se ipsos: nous ne savons, car les deux sont possibles grammaticalement, en raison soit de l’opposition entre la lumière divine en elle-même et la lumière en tant qu’unie aux choses vraies, soit de l’antithèse entre la perception de voir la vérité suprême, que tous voient de quelque façon, et la non-perception de cette vi­ sion de la lumière. Nous pensons que le sens de R. Grosseteste est celui de la conscience ou la non-conscience de voir la lumière di­ vine répandue dans la création, tandis que Guibert l’entend de la perception de la lumière divine elle-même, en raison de sa théorie de l’information de la substance de l’âme par cette lumière qui lui parvient de Dieu par le miroir de la création. Cette comparaison du miroir n’est pas employés par Guibert, 22. /bid. n. 4-7. 23. Ibid. n. 8 .

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