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C AM ILL E BERUBE 1 4 5 venture domine de haut le texte qu’il semble avoir sous les yeux, le corrigeant et dégageant du littéralisme et du parallélisme entre la vision oculaire et la vision intellectuelle qui jouent un rôle prépon­ dérant chez Guibert. La pensée de Bonaventure représente donc une étape plus mûre de la doctrine de l’illumination et de la con­ naissance de Dieu. Un progrès semblable se note aussi chez Henri de Gand, mais il est beaucoup plus un progrès dans l’ampleur de la discussion et de l'information que dans la teneur même des doctrines. C’est même un fait assez surprenant que de retrouver vers 1275 une doctrine formulée apparemment dans un contexte doctrinal beaucoup moins évelué. Tout semble se passer comme si Henri de Gand, ayant ac­ cepté d'emblée les thèses de Guibert, se fût donné pour tâche de les justifier par saint Augustin, Avicenne et la philosophie néoplato­ nicienne de la participation, tout en y faisant quelques retouches se­ condaires. Cette constatation invite à penser que peut-être Henri a subi quelqu’influence précoce de Guibert ou de l’école franciscaine de Paris, comme aussi que les 24 premiers articles de la Summa quaes- tionum ordinarium ont été composés avant 1276, qu’on tient ordi­ nairement pour le début de la Summa, parce qu’elle est le résultat des disputes ordinaires de théologie tenues par Henri. José Gômez Caffarena, S.J., émet d’ailleurs cette hypothèse tout en notant que l’article 21 a été remanié plus tard. La confrontation des lieux et des dates de la carrière de Gui­ bert et d’Henri rend cette influence de Guibert sur Henri possible, sinon plausible. Guibert est né à Tournai vers 1200, enseigne à Pa­ ris vers 1235-1240, et y réside habituellement, puis meurt à Tour­ nai en 1284. Henri, né à Gand vers 1217, fréquente l’école cathédra­ le de Tournai pour continuer ensuite ses cours à la faculté des Arts de Paris, et meurt à Tournai en 1293. De plus, Henri est chanoine de Tournai à partir de 1267, et prend part au Concile de Lyon, en 1274, en compagnie de Guibert et de saint Bonaventure34. Deux concitoyens de Tournai transplantés à Paris ne pouvaient s’ignorer et ont pu entretenir des relations intellectuelles qui expliqueraient la dépendance d’Henri vis-à-vis de Guibert. Mais en attendant que 36. C f. J e a n P a u lu s, Henry o f Ghent, d a n s New Catholic Encyclope­ dia, t. 6 c o l. 1035.

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