PS_NyG_1974v021n001p0131_0172

1 4 4 H E N R I DE G AN D ET M ATH IEU D’ AQUASPARTA. de la vision oculaire décrite à la suite des philosophes arabes, ou dans la métaphore de la métaphysique de la lumière, il ne lui reste plus qu’à échafauder des théories subtiles pour expliquer qu’en par­ lant de ’vision de Dieu’ et de ’vision en Dieu’ Guibert de Tournai et Vltineraire voulaient signifier tout autre chose que ce que les ter­ mes semblent dire pour un lecteur du XXe siècle*. Les succeseurs de saint Bonaventure, par exemple, Eustache d’Arras (1263-1266) et Jean Peckham (1269-1271), dont I. Jeiler publiait quelques textes, s’orientent dans le sens de l’interprétation de la connaissance dans les raisons éternelles comme une ratio co- gnoscendi et non un objectum cognitum. Cela apparaît dans le ti­ tre même de la question de J. Peckham: utrum sit ratio cognoscen- di. Il y dit expressément que la lumière éternelle n’est pas un objet de l’esprit humain, mais seulement une lumière qui montre la vérité des intelligibles, comme la vue n’atteint la lumière solaire que ré­ pandue sur les choses3*. Mais déjà Eustache d’Arras était allé plus loin et avait décrit ces règles éternelles par les quelles la lumière incréée dirige l’esprit dans la connaissance de la vérité, comme des irradiations éma­ nant de la vérité incréée qui sont des ressemblances d’elle-même, et par lesquelles l’esprit juge de tout, sans voir cette vérité in­ créée. Il introduit ici un intermédiaire créé entre la lumière éterne­ lle et l’esprit, cet ’habitus’ que Bonaventure excluait dans la ques­ tion 4 du De scientia Christi. Henri de Gand et Mathieu d’Aquaspar- ta suivront aussi cette voie, ouverte par Guibert de Tournai lui-mê­ me III. Illumination et connaissance de Dieu chez Henri de Gand. De la confrontation rapide de Guibert de Tournai et saint Bo­ naventure, il résulte qu’une influence du premier sur le second est vraisemblable. Elle reste toutefois fort générale, parce que Bona- 33. Cf. notre article mentionné à la note 13. 34. F r . J o a n n is P ech am i Quaestio disputata, in S a n c t i B o n a v e n tu - r a e De humanae cognitionis ra tion e...” . p. 182 ad 4. 35. F r . E u s ta c h ii Quaestio disputata prima, ibid. p. 186 ad 4: “ ...non vult Augustinus dicere, quod Veritas increata sit formaliter ratio viden- di alia, et quod h oc flat aspiciendo in illam immediate; sed hoc facit per quasdam régulas, hoc est per quasdam irradiationes vel illustrationes su­ per mentem, quae ideo dicuntur regulae, quia directivae sunt mentis in notitiam aliarum veritatum. quae sunt expressissimae illius veritatis si- militudines... Ideo videndo in illis dicimur videre in ilia Veritate” .

RkJQdWJsaXNoZXIy NDA3MTIz