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90 CAMILLE BÉRUBÉ Dieu' 66 . Dieu, a créé toutes choses, explique S. Bonaventure, "non pour accroî– tre sa gloire, car Dieu n'a pas d'autre raison que son amour et sa bonté" 67 • "C'est la clef de l'amour qui a ouvert sa main pour produire les créatures" 68 • Voici la réponse de Bonaventure. Dicendum quod finis conditionis rei sive rerum conditarum principalior est Dei gloria sive bonitas, quam creaturae utilitas... Ergo propter suam gloriam, non, inquam, propter gloriam augendam, sed propter gloriam manifestandam et prop– ter gloriam communicandam; in cujus manifestatione et participatione attenditur summa utilitas creaturae, videlicet ejus glorificatio sive beatificatio 69 • Mais si on se reporte au texte latin de Bonaventure, on constate que c'est un accomodement bénévole et non une traduction littérale. On a introduit l'amour à la place de la gloire de Dieu unie à l'utilité des créatures. C'est ici saint Thomas qui parle de l'amour de Dieu pour l'homme, qui ouvre la main puis– sante de Dieu 70 . Duns Scot, avec Raymond Lulle et Guillaume de Ware, intro– duisit clairement l'amour de l'homme pour Dieu comme raison de la création: Vult alios condiligentes 71 , sans passer par le détour de la manifestation de la gloire de Dieu pour arriver à la glorification de l'homme par Dieu. Ainsi Bonaventure dit qu'en dernière analyse, la volonté de Dieu dans la création, c'est la glorifica– tion et béatification de la créature, non sa propre glorification. Conclusion: La leçon de Bonaventure Cet exemple de l'embarras d'un théologien moderne devant un texte de Bonaventure, nous montre que les textes de saint Bonaventure qui donnent l'excessive miséricorde comme la raison principale de l'incarnation du Verbe sont peu connus. C'est le mérite de Gerken d'avoir insisté sur l'excessive bonté de Dieu, et de l'avoir liée avec la rédemption. Nous pensons toutefois que la rédemption n'est pas la fin absolue voulue pour elle-même, mais le moyen par lequel la charité infinie et désintéressée de Dieu prend le nom d'excessive misé– ricorde. Si Gerken avait lu la distinction Sent. III, d. 32, de Scot, sur la charité de 66 Cf. Denzinger-Schônmetzer, n. 3025 (Concile du Vatican I). 67 Bonaventura, Sent. II, 1, 2, 2, 1. 68 Cathéchisme de l'Eglise catholique, Ottawa 1993, p. 70-71, n. 293. 69 Sent. II, 1, 2, 2, 1-2; II, 44. 70 Thomas Aquinatis, Sent. II, prol. 3. 71 Cf. Scotus, Sent. III d. 32; Vivès XV, 432.

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