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478 KORNEL GADACZ 1871, faisait de même, mais exceptait les prétres de la faveur. En vertu donc du premier décret, un groupe de prêtres reçut la permis– sion de quitter Tunka et de venir s'établir dans quelque « gouver– nement » à population russe, en Europe. Les éventuels candidats devaient partir a leurs propres frais. En 1872, en conséquence d'une amnistie signée par le tsar, 30 prêtres purent quitter Tunka en direction de la Russie d'Europe. Le versement des 20 kopecks journaliers qu'ils percevaient précédem– ment fut sur-le-champ suspendu et eux-mêmes se trouvèrent abandon– nés à la faveur du sort. Pareille conjoncture dura six mois. Puis « au milieu des gelées sibériennes le plus atroces et d'immenses neiges » ordre fut donné de les faire passer à Irkoutsk. On les y mena donc, à plusieurs sur un traîneau, et on les y retint l'espace d'une huitaine. Ils durent se présenter à la prison principale, puis, en une même fournée avec des ex-criminels moscovites, ils prirent le chemin de la Russie. « Aucune prière, aucune supplication, aucune représentation - rien n'y fait: nous voilà encerclés d'une soldatesque impudente et effron– tée et revêtus, pour susciter risée et mépris publics, du costume difforme de la chiourme: houppelandes de drap épais et touloupes marqués au dos de grosses lettres noires. Les affaires d'un chacun furent chargées sur un attelage commun, et nous nous ébranlâmes ainsi, à pied, pêle-mêle avec les malfaiteurs, sur la piste menant vers l'ouest. Ceci se passait le 19 janvier 1873, par un froid de - 35°. Nous n'atteignîmes qu'à 2 heures et demie de la nuit l'étape suivan• te, à plus de 6 milles polonais d'Irkoutsk, pour y "dormir". Arrivés là transis, misérables, nous nous écroulâmes sur les planches nues du local puant, d'un froid indescriptible et d'une crasse sans pareille. Nous n'avions plus ni souffle ni vie. Un vieillard de 71 ans, le P. Cy– riaque S:1:otwiftski, capucin, expira là, le lendemain. D'autres prêtres de mes compagnons eurent, qui le nez gelé, qui les oreilles, les ta– lons, le visage, les doigts ou les orteils » 69 • Le P. Cyriaque mourut donc, le 31 janvier 1873, à Katoulik, sans avoir pu atteindre le «gouvernement» de Vologda vers lequel il avait dirigé ses pas. Le pope du lieu ayant appris que le défunt avait été prêtre catholique, fit revêtir le cadavre d'un habit monacal et le fit porter à l'église russe; il posa l'évangéliaire sur la bière et célé– bra les obsèques en observant tous les rites prescrits pour les prê– tres orthodoxes. Et, sur la tombe, il fit placer la croix des catholi– ques romains 70 • Une partie des prêtres mit aussi à profit le décret du 2 janvier 1874. Inutile d'ajouter que ne purent partir pour la Russie que ceux-là 69 Wiadomosci koscielne, 1876, n.11, p.110; 1877, n.24, p.189-191. 70 E. z S., Wspomnienie, 22, 54; S. MATRAS, Ze wspomnien, 246; KUBICKI, op. cit. III, 704; Wiadomosci koscielne, 1876, n.18, p.185.

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