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LES CAPUCINS AU SERVICE DES PESTIFÉRÉS 203 Le lendemain, le P. François-Marie se sentit très mal, et « le lundy au matin, on crut qu'il alloit mourir. Le P. Ange se trouvant pareillement très mal, encors qu'il n'y parut pas, se leva de sa couche, et s'en alla se confesser au Vénérable Père François-Marie, se mettant dévotement a genoux au bout de sa couche, et puis s'étant confessé, entendit la confession du P. François-Marie ». Tous deux reçurent les derniers sacrements des mains du P. Pro– tais de Lisieux qui les laissa, étant obligé d'aller avec le P. Alphonse de Rouen confesser en ville, « ou il y avoit quantité de malades, sans ceux qui étaient dans l'hôpital et qui se montaient au nombre de plus de cinq cens, et dans chaque lit il y en avoit cinq ou six, et cependant [les capucins]' ne laissaient pas de monter sur les couches, et de les confesser les uns après les autres, mettant leurs oreilles sur les bouches de ces malades pour mieux entendre leurs confessions, affin que ceux qui étaient proche ne pussent pas entendre... ». Ce fut, ajouta le P. Philippe de Paris,« en cette façon de confesser que tous nos Pères gagnèrent la peste ». Après le départ du P. Protais de Lisieux, le P. Ange, se sentant à toute extrémité, dit au P. François-Marie: « J'aurais besoin de vous, si vous aviez des forces assez suffisantes, que vous me rendissiez la pareille, que vous me donniez !'Extrême-Onction,. ainsy que je vous ai entendu en confession ». Le P. François Marie, « plutot en état de la recevoir que de la donner, se fit violence et se fit... soutenir par les bras par un jeune garçon qui les servait, et luy donna le sacrement», mais à peine avait-il tracé la dernière onction qu'il défaillit entre les bras du jeune homme qui le remit sur sa couche. Le P. Ange craignant que son compagnon expirât, s'efforça de lui rendre le même service,. puis se remit lui aussi sur son lit. À peine avait-il terminé que les PP. Protais et Alphonse arrivèrent en toute hâte, pressentant la fin prochaine des deux malades. Quelle ne fut pas leur surprise en apprenant ce qui s'était passé, et en les trouvant se disant l'un et l'autre la recommandation de l'âme. Le P. Ange sentant sa fin approcher « tenait son crucifix sur sa joue..., produisant plusieurs actes d'amour avec grande ferveur d'esprit, monstrant un visage gai et plutôt angé– lique qu'humain. Aiant donc posé sa bouche sur les pieds du Cru– cifix, sans faire aucune violence, disant et prononçant ces mots: 'Jacta super Dominum curam tuam et ipse te enutriet' il mourut saintement en r~ndant son âme toute pure entre les mains de son Créateur»,. après quatorze ans de vie religieuse. Quant au P. François-Marie de la Bourdonnière, il demeura en-

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