BCCCAP00000000000000000000712

8 Gagnan Jean, Paul et Matthieu n'hésitent pas à utiliser, pour raconter la Pas– sion (1 2 ), des citations des psaumes 21 et 68, ceux auxquels François recourra davantage. Dans la mesure où la prière de François évoluait vers la forme d'office qui le structure aujourd'hui, cette attribution des sentiments de Jésus aux formes mêmes de la prière pouvait rejoindre alors la symbolique traditionnelle des heures. En effet, ainsi que l'a montré le p. Schmucki ("), il était alors coutume d'attribuer à chaque heure de l'office une thématique symbolique se rapportant à tel ou tel épi– sode du mystère rédempteur. Ces grilles de lecture, ainsi qu'en té– moignent les nombreux exemplaires qui nous restent, pouvaient varier quant à certaines attributions particulières, mais, dans l'ensemble, elles s'accordent assez pour tenter de moduler la lecture quotidienne de l'office sur le conseil de Paul, s'efforçant de poursuivre les senti– ments de Jésus dans le dynamisme de souffrance et de gloire dont témoigne l'itinéraire de la mort à la résurrection. L'influence de ces tendances interprétatives sur la mentalité de l'office de François fut, nous le verrons, déterminante. Par ailleurs, si certains ont déjà remarqué que ce type d'office votif destiné à l'usage personnel a existé au moyen âge, avant et après la vie du saint, il semble bien, si l'on en juge d'après les exemplaires que l'histoire nous a laissés, que cette manière de reconstruire des psaumes à partir du langage psalmique ait été propre à François. Avec une rare maî– trise de cette forme littéraire, le Poverello recompose, en fidélité au langage de l'Eglise, l'expression de sa vision de la croix. Par delà toute appropriation immédiate (il ne s'agit point ici d'un chemin de croix où chaque psaume renverrait successivement à une image fixée), l'auteur poursuit sa reconnaissance intime du Christ pauvre et cru– cifié, en évoquant le discours d'obéissance sacrificielle que le Fils lui– même adresse au Père lors de sa passion. Dans le développement, (l') « Les deux psaumes les plus souvent mis à contribution sont, ainsi qu'on pouvait s'y attendre dans une évocation de la Passion, les Ps 21 (cinq citations dans quatre psaumes de François) et 68· (sept citations dans cinq psaumes de François)»: L. GALLANT, 316-317. Or: Mt 27, 35; 27, 39; 27, 43; 27, 46; sont des références au Ps 21, qu'utilise Matthieu pour raconter la Passion; de même ln 19, 24; et He 2, 12. Pareillement: ln 2, 17; 15, 25; 16, 32; 19, 28; sont des références au Ps 68, qu'utilise à cette même fin; de même: Mt 26, 40; 27, 34; 27, 43 et Rm 11, 9-10; 15, 3. (") O. ScHMUCKI, Das Leiden Christi, 133-134; L. GALLANT ajoute quelques témoignages venant appuyer l'argumentation de O. Schmucki: Dominus regnavit, 502-509.

RkJQdWJsaXNoZXIy NDA3MTIz