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LE P. CHÉRUBIN DE MAURIENNE 27 A quelle date juste les Capucins entrèrent-ils à Thonon ? Nous ne saurions le dire, attendu que << les lettres imprimées et les autres escrits qui nous restent de ce temps là n'en parlent pas distinctement ni assez précisérnent >>. Quoi qu'il en soit, leur venue combla de joie l'apôtre du Cha– blais; souvent il se plaisait à leur dire : << Mes pères, vous m'êtes envoyés de Dieu et du grand père de famille, le Pape, auquel j'ai représenté que la moisson était grande, qu'elle commençait à blanchir de toutes parts, et que nous avions besoin d'ouvriers pour la récolter. Je suis pauvre comme vous, car je suis fils de famil:e, mais Dieu vous donne courage et il vous bénira>>. Précieuses paroles! Mais, ne l'oublions point, ce ne fut pas sans avoir beaucoup peiné que l'infatigable semeur put voir la moisson blanchir. Que d'obstacles se sont dressés devant lui; que de dangers n'a-t-il pas bravés; que de fatigues n'a-t-il pas supportées. << Il n'y a rien, écrit le P. Charles de Genève, que cet homme apos– tolique n'eût fait pour réunir à l'Église les Tononais : il y avait employé ses prières, ses prédications, et ses travaux avec beau– coup de zèle, de fatigue et de mérite, mais non pas avec tout le fruit qu'on devait attendre d'un homme si saint, si doux, et si affable, si sage, si sçavant, si constant et si apostolique. Il se plaint de l'obstination des Tononais dans ses lettres au Sénateur Favre, son ami, et escrivant à S. A. R. : << Voici la seconde année, dit-il, qui se passe dès que l'on a commencé de prêcher à Tanon, sans jamais interrompre, avec fort peu de fruit ... qu'il avait employé vingt-sept mois en ce misérable païs, afin d'y épancher la semence de la parole de Dieu; mais, dit-il, j'ai semé entre les épines ou bien sur les pierres : car, outre la recouverte de M. d'Avully et de l'advocat Poncet, ce n'est pas grand cas des autres ; ce sont les propres paroles de ce saint rapportées par son illustrissime nepveu, Charles-Auguste de Sales>>. (Hist. abr., p. 39). Cependant tout a une limite ; même les natures les plus vail– lantes rencontrent des bornes qu'elles ne peuvent outrepasser. << La moisson de Thonon est un fardeau, disait François, qui dépasse mes forces>>. (r) Sans doute, elle commençait à blanchi1 ; mais avant de l'engranger que de sueurs il faudra encore verser t << Il est si difficile d'émouvoir les Tononais, q_ui paraissent tou– jours insensibles ! >><<L'année mil cinq cens nonante huit, rapporte le P. Boniface Constantin S. J., les citoyens (de Thonon) estaient (r) Œuv., t. XI, p. 153.

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