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258 D. Gagnan qu'elle en est la plus noble expression, son image récapitule dans son symbolisme l'ensemble de ces forces. Par les entrailles de la femme se spatialise l'œuvre des dieux. Marquée de ce caractère sacré, elle appartient toujours au clan de ces filles des hommes qui connurent les fils de Dieu (Gn. 6,8); et, selon sa fidélité, elle est ou l'Eve qui engendre la mort à partir de l'arbre funèbre, ou la Vierge, mère du monde, au pied de l'arbre de Vie. Tissé dans la nature, ce sens de la femme apparaît déjà dans le plus lointain souvenir de la conscience. Entre le cinquième et le troisième millénaire avant l'ère chrétienne, les Vénus sculptées de l'art gravétien du paléolitique supérieur et les dessins sacrés de l'Asie occidentale brossent le masque archaïque de la déesse-mère. Lorsque débute l'agriculture dans le Proche-Orient antique, le pou– voir productif de la terre s'incarne dans une déesse qui règne de l'Inde à la Méditerranée, vierge-mère qui personnifie le principe divin de la maternité. Puis c'est la déesse Istar, mère-amant du dieu-roi Mardouk; Isis, l'égyptienne qui porte le fils Horus sur ses genoux... Situant pleinement dans le temps et dans l'espace la réalité qu'exprimait déjà cette logique inscrite dans la vie, la révélation chrétienne permettait à cette démarche de la pensée de se recon– naître, purifiée des nombreuses excroissances qu'y avait engendrées au cours de l'histoire la décadence des spiritualités. Par sa foi, Ma– rie, mère de Jésus, est devenue mère des croyants; soit, mère des sauvés, mère des hommes libres. Saint Irénée expliquait ainsi l'uni– versalité de cette maternité: Eve fut désobéissante: elle désobéit en effet alors qu'elle était encore vierge (...), si donc Eve se fit désobéissante et devint, pour elle· et pour tout le genre humain, cause de mort, Marie, Elle, épouse d'un homme prédestiné, et cependant vierge, est devenue par son obéissance, pour Elle et pour tout le genre humain, cause de sa– lut (...). La vie «remonte» dans le sens de Marie à Eve; car on ne peut délier ce qui a été lié qu'en défaisant en sens inverse l'assem– blage des noeuds en sorte que les premiers soient déliés grâce aux seconds ou qu'en d'autres termes les seconds libèrent les pre– miers .( ..). Le noeud que la désobéissance d'Eve avait noué a été dénoué par l'obéissance de Marie; ce qu'en effet la vierge Eve avait lié par son incrédulité, la Vierge Marie l'a délié par la foi 1 • 1 SAINT IRENEE DE LYON, Adversus haereses, Lib. III, 22, 4, Texte latin, fragments grecs, introduction, traduction et notes par F. Sagnard, SC 34, 1952, 379-383.

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