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264 D. Gagnan De la fiancée à l'épouse Essentiellement fidèle à la révélation de Dieu en lui, et attaché aux formes de cette révélation, François, contrairement à la répu– tation qui lui est faite 13 , n'accorda guère de place à l'improvisation dans la formulation de son message. Nées dans la lumière du don de Dieu, quelques grandes intuitions avaient axé, dès sa conversion, l'orientation définitive de sa pensée. De sa vie il ne devait plus quitter ces intuitions ni les images qui les avaient formulées, images indissolublement liées à leur expression. Par la lecture, la médita– tion et la prière, il allait travailler ce matériau de signification di– vine. Tel l'artiste qui forge son style en reprenant sans cesse sous divers angles, couleurs et langages, la figure d'une même vérité afin de la dégager de tout ce qui n'est pas elle, il allait employer sa vie à poursuivre, à approfondir et à purifier cet appel divin dans l'expres– sion même qui lui en avait été donnée. Du songe de Spolète, ce songe qui marque la mue de l'adolescent angoissé en héros de Dieu, jusqu'à la mort du saint, les Trois grands symboles de la parabole fran– ciscaine (roi, femme et chevalerie) constituent les types majeurs de ce matériau, ceux à partir desquels s'organise le langage de François, son prophétisme, disons: le franciscanisme. On voit 14 combien l'affirmation seigneuriale donnée comme un entendre retentit à partir de ce songe initial pour entraîner le Po- 13 Après avoir rapporté comment François raconta sa parabole à Innocent III, O. ENGLEBERT, dans sa Vie de saint François d'Assise, ajoute en guise de com– mentaire: « S'il était un peu poète, Innocent dut être conquis par ce troubadour en guenilles qui chantait d'un tel cœur le bonheur d'être pauvre» (Paris, Albin Michel, 1956, 118-119). Telle est bien l'image superficielle qui détruit le sérieux du symbolisme franciscain. Ce n'était sûrement pas parce qu'il était « un peu poète » que le pape comprit François (qui n'avait pas l'allure d'un « trouhadour en guenilles» mais celle d'un moine pauvre, ce qui n'a rien à voir!), mais parce qu'il était familier du symbolisme de !'Ecriture où le saint puisait abondamment. Ayant ainsi réglé le « poétisme » de François, l'auteur est bien obligé de chercher quelque part un « contenu » qui justifie la demande du Poverello au Saint-Siège; aussi, aidé de travaux fort « savants », tente-t-il de reformuler cette première règle qu'amenait le saint pour la présenter au Pape (112-113). Mais Innocent n'eut aucune réaction devant cette règle (il en avait vu d'autres!) que les biographes n'ont même pas jugé bon résumer ou rappeler! Sans plus de commentaires affirmons que le Franciscanisme n'est pas né dans la recon– naissance ecclésiale d'un texte législatif, mais dans la reconnaissance d'une parabole d'inspiration biblique; parabole qui nécessite, pour être comprise, que soit perçu combien le véritable poétisme est une sagesse, et combien il est radicalement distinct d'un poétisme de décoration, sorte de fioriture rajoutée et improvisée au gré d'on ne sait quel caprice de l'imaginaire. 14 Cf. notre étude François au livre de la Nature, les deux articles Le Soli– taire in Etudes Franciscaines, 21 (1971) 179-241 et 357-399.
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