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_____ 11. TEMAS EN TORNO A MI PENSAMIENTO CRISTIANO Double source de la conception bonaventurienne de l'amour Nous avons vu qu'a partir d'une pure description phé– noménologique le passage est facile de l'amour person– nel a l'amour impersonnel. Un exemple de ce passage est Saint Bonaventure. Mais nous croyons que le probleme de notre docteur a une composante historique que nous ne pouvons méconna1tre. Dans notre étude : «Doble fuente histórica del con– cepto de naturaleza en San Buenaventura», 24 nous som– mes arrivés a la conclusion que le saint raisonne, en utilisant ce concept, sous l'influence de la philosophie grecque et de la pensée biblique. De la philosophie grec– que, il res;oit un concept de nature liée a l'ordre de l'essence. Ce n'est pas autre chose que l'essence meme en tant que príncipe d'opération. Mais la pensée biblique lui fait reconna1tre la dépendance de la nature envers le Créa– teur. Ce n'est pas autre chose que !'ensemble des lois par lesquelles le Créateur a lié les etres entre eux. A cette double source, nous devons aussi recourir dans le probleme de l'amour. La volumineuse étude de A. Nygren, Eros und Agape a reconnu le double influx. 25 Eros nous parle de la vision pa'ienne de l'amour. Mais Agape est le terme qui exprime le ~oncept propre de l'amour chrétien. La contradiction qu'a vue Nygren entre Eros et Agape est évidente et a été acceptée. Ce qui n'est pas acceptable, c'est que A. Nygren ait entrevu une totale incompatibi– lité entre l'un et l'autre, et qu'il interprete la notion de charité comme le fait Saint Augustin, comme un effort inviable pour réunir les deux amours. II voit dans la conception de la charité chez Saint Tho– mas la supreme paganisation de I 'Agape chrétien, losrqu'il tente de définir la charité selon le scheme aristotélicien de l'amitié. L'antithese nature-grace, si fortement sentie par le pro– testantisme des origines de la Réforme, donne la clef pour interpréter l'oeuvre de A. Nygren. Ainsi, malgré son appa– rat technique, ce nous para1t une oeuvre dont la vision est tres unilatérale. Nous acceptons la these de la double source, grecque et chrétienne, dans l'élaboration du con– cept de charité. Certainement l'influx grec et l'influx bibli– que pesent sur les grands docteurs Augustin, Thomas et Bonaventure. Mais il ne s'ensuit pas qu'ils ne soient pas parvenus a une synthese des éléments naturels de I'Eros avec les éléments surnaturels de l'Agape. Par rapport a Saint Bonaventure, objet de notre inves– tigation présente, une réflexion poussée nous a portés a la conviction que les nuances si variés dont il colore son amour personnel envers Dieu sont presque toujours issues de la pensée biblique. Quand, au contraire, il raissonne en penseur, en théologien ou en philosophe, on sent aus– sitot les influences de la philosophie grecque. Dans le Commentaire des Sentences, lorsqu'il traite de la charité, il se demande: «An charitas in diligendo prae- 100 Formas fundamentales del amor ____________ ponat Deum nobis?» et entend déterminer l'ordre qui doit régir notre charité. II répond a cette question si théolo– g1que: Secundum quod vult philosophicum documentum, finis magis est diligendus quam ea quae sunt ad finem: sed ad ord_i– nem charitatis spectat, ut magis diligat ea quae sunt mag1s eligenda: si ergo bonum increatum est finis, et bomun crea– tum est quod est ad finem, videtur quod in órdine charitatis semper bonum increatum, quod est Deus, praeponatur bono creato, quod nos sumus. 26 Nous notons en premier lieu que le document philo– sophique dont il parle dans ce texte est celui qu'Aristote présente dans le livre III des Topiques. 27 Ainsi done, le saint élabore sa théorie de l'ordre qui doit etre observé dans l'objet de la charité sur le príncipe aris– totélicien. Le raisonnement est nettement philosophique. La charité prend ici une allure nettement impersonnelle. Or, si nous examinons le sens historique de ce raison– nement, nous devons arriver au changement opéré dans le concept d'Eros platonicien dans l'oeuvre d'Aristote qui transforme cet eros en orexis, c'est-a-dire dans la tendance de tous les etres vers leur fin. 28 La conception d'Aristote sur la tendance de tous les etres vers leur fin est utilisé par Saint Bonaventure comme nous l'avons vu dans le texte cité. Mais, il l'est beaucoup plus par Saint Thomas qui définit sa théologie morale comme «motus rationalis creaturae in Deum», comme ten– dance de l'homme vers sa fin ultime. 29 Ainsi done, il est étonnant que la these de Z. Alszeghy, manifestement inacceptable, oppose l'amour imperson– nel de Saint Bonaventure a l'amour personnel de Saint Thomas. II est manifeste que la morale thomiste dont l'ordination supreme se vérifie dans la charité, est tout entiere cons;ue comme tendance vers la fin ultime. A preuve, les premieres questions de la Prima Secundae de la Somme. Le theme de l'amour impersonnel est inévita– ble dans la conception thomiste, beaucoup plus que dans la conception de Saint Bonaventure. La these de Z. Alszeghy para1t avoir un point d'appui dans la conception de la charité comme amitié. L'art. 1 de la q. 23 de la Ila-Ilae est évident sur ce point. Ce pas– sage se trouve totalement imprégné par la conception aris– totélicienne de l'amitié comme relation personnelle. Mais, la seule chose qui est prouvée est que tout n-est pas imper– sonnel dans le monde grec, ni tout personnel dans la pen– sée biblique. Ce personnalisme de la charité n'empeche pas que nous insistons sur le profond impersonnalisme de la morale thomiste. Nous pouvons voir qu'aussi Saint Bonaventure, a qui Alszeghy impute l'exclusivité de l'amour impersonnel, use d'Aristote dans la vision de la charité comme amitié. II écrit, en effet, dans un texte: Si enim per affectum amicitiae horno servit amico, et eum diligit sine intuitu praemii, sicut dicit Philosophus, multo fortius amore charitatis horno vult Deo sine intuitu alicu– jus retributionis. 30 SUPLEMENTOS ANTHROPOS/26
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