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ANÁLISIS E INVESTIGACIÓN ANÁLISIS TEMÁTICO s'apen;ut que le christianisme impliquait toute une philosophie, qu'il se voua a ex– pliciter. A travers la réflexion bondélienne sur le vinculum substantiale ( conc;:u par Leibniz d'une maniere trop intellectua– liste), E. Rivera établit brillamment que surgit chez le maitre franc;:ais l'expérien– ce d'un Dieu tout Amour, dont le pan– christianisme est la clef, mais sans ja– mais tomber dans le panthéisme. Le mystere del 'Incamation répond aux plus intimes aspirations du coeur humain, bien qu'il soit un don tout gratuit, nulle– ment nécessité par l 'essence divine. E. Rivera suit, avec l'attention la plus avertie, l'approfondissement de cette doctrine chez Blondel, depuis sa these sur L'Actionjusqu'a la Trilogie de la fin de sa vie, ou elle s'épanouit complete– ment, a travers trois aspirations fonda– mentales: l'unité, la charité et la ressem– blance avec Dieu; sur ce point, le philo– sophe franc;:ais, est, d'apres son interprete salrnantin, tres influencé par la these seo– tiste sur l 'Incamation (d 'ailleurs, sensi– blement différente de celle de S. Bona– venture). Paimi les autres observations fructueuses de E. Rivera. , on remarque aussi les pages dans lesquelles il montre qu'alors que, des la premiere des neuf étapes de son ltinerarium, le philosophe italien accede a la possession du Christ, Blondel ne parvient a elle qu'au tenne de son long et douloureux périple spirituel ---d'autant plus qu 'il refuse de faire in– tervenir le sumaturel et la théologie, avant d'avoir atteint la neuvieme «onde» ou méme la dixieme (qui constitue l'éta– pe supréme) (cf. p. 378). De son coté, Bergson, a beaucoup séduit E. Rivera qui suit l'exégese d'Edouard Le Roy . Trois articles ont été consa– crés par lui au philosophe parisien. Successivement, «E. Bergson y M. de Unamuno: dos filósofos de la vida» (Cuadernos de la Cátedra M. de Una– muno, XXII [1972], 99-125), «San Bue– naventura y H. Bergson. Estudio compa– rativo de dos antropólogos» (Salmanti– censis, t. 29 [1974] , 27-67), «Motivation de la fratemité humaine par Bergson et par Unamuno» (Mélanges offerts a Alain Guy, revue Philosophie, n.º triple XII– XIII-XIV [1986-1987-1988], tome 11, 179-1 88). Le rapprochement entre les deux auteurs s'appuie sur le parenté pro– fonde de ces philosophes de la vie, con– tre l' intellectualisme abstrait et dessé– chant, voire réducteur; mais, sous cet an– gle, E. Rivera ne cache pas - au dela de ses deux inspirateurs qu'il admire- son aversion pour les exces d'un certain vita– lisme, que est parfois devenu crimine!, a notre époque de racisme surtout (cf. «H.B. y M. de U.», p. 99). Notre collegue salmantin adhere, sans 114/ANTHROPOS 122/123 réticence, a la lutte de Bergson contre le scientisme et le mathématisme envahis– sant: «d'un regard avisé, Bergson péne– tre dans !'intime structure et dans la fonction essentielle del 'intelligence et il s'aperc;:ut qu 'il était téméraire et sans fondement de réduire la réalité a un uni– que mode d'étre et de réduire le savoir a une seule forme de pensée [...]. On ne nie pas, ce faisant, la valeur de la scien– ce; tout simplement, on la limite [...]. Traiter le vivant comme s'il était inerte conduit a méconnaitre la vie elle-méme, pour n'en retenir que la résidu matériel (ibíd., p. 100). Pareillement, Unamuno a réagi a la fois contre l'idéalisme absolu de Hegel et contre le positivisme de Spencer, en plaidant avec force en fa– veur du primat de la vie; mais, a la diffé– rence de Bergson, qui se borne aux as– pects harmonieuses de l'existence et de l'évolution, Unamuno privilégie le senti– ment tragique de la vie. A !'instar de Jean Wahl (expressément cité par E. Ri– vera), Unamuno insiste sur «la conscien– ce malheureuse» et terriblement déchi– rée. «Bergson représente un retour a l'esprit hellénique de la tranquillité» (p. 103) «et ne descend jamais aux combats des passions humaines» (loe. cit.); l'élan vital n'est pas un combat, mais plut6t une ascension sereine; le probleme du mal n'apparait pas chez Bergson. Au contraire, pour Unamuno, les menaces contre le moi , qu 'attend peut-étre le néant (pseudo-concept, pour Bergson), sont irrécusables; seuls, le coeur et la foi intense peuvent en triompher --de fac;:on toujours précaire, ici-bas, du reste. D'autre part, si les deux grands pen– seurs s'accordent par leur gofit pour l'intuition, Unamuno semble la porter plus loin que Bergson, car il la voue au désir et a l'espoir d'inmo11alité et d'étemi– té personnelle. Si tous deux se haussent finalement au plan mystique, en dé– passant le plan d' une morale ou d 'une religion répressive, extrinséciste et so– ciologique, Unamuno le fait avec beau– coup plus d'affectivité et méme de vé– hémence -ce qui décide entre eux une différence de tempérament et, sans dou– te, aussi de méthode. Dans son article «Motivation de la fratemité humaine par Bergson et par Unamuno», les convergences sont sou– lignées, de préférence aux divergences. Ici E. Rivera se réfere surtout au Deux Sources. Alors que Gandhi croyait qu'on passait insensiblement de l'égoYsme au sentiment familia!, puis au sentiment na– tional et enfin a l'universalisme, Berg– son estime qu 'il y a une solution de con– tinuité entre la pousée biologique (nous incitant a la conservation de notre indi– vidualité, puis a l'attachement a la fami– lle ou a la patrie) et l 'inspiration désinté- ressée qui nous éleve al 'ainour universel, a la pleine philanthropie, qui elle, s'avere d 'un tout autre ordre: le plan mystique que E. Rivera s 'écrime: «Il est tres agréable a un penseur chrétien de perce– voir 1 'enthousiasme de ce penseur exi– geant a l'égard des Mystiques, chez qui il voit la grande réserve spirituelle de cette humanité [...]. Comme espagnol, il m 'est agréable de pouvoir constater en la personne de Bergson l'un des initiateurs de la compréhension qu'une grande par– tie de la haute intelligence franc;:aise de ce siecle a manifestée envers le mysticis– me hispanique» (p. 185). Semblable– ment, Unamuno superpose a !'esprit égoYste et a la ferveur familiale, puis pa– triotique, l 'humanitarisme intégral, fruit du christianisme, qui nous rend tous fre– res, en tant que fils de Dieu; mais il ne fait point appel au pur biologique; des le départ, il se réfere au religieux, a l'in– trahistorique spirituel. L'estime pour Étienne Gilson est éga– lement importante chez E. Rivera; elle parseme toutes ses oeuvres, en dépit de son appartenance au courant scotiste et bonaventurien. Si J'on se rep011e au seul travail dont Gilson fait l'objet chez lui, «In memoriam. Étienne Gilson, historia– dor del pensamiento medieval cristiano» (Cuadernos Salmantinos de Filosofía, V [1978], 465-468), on y trouvera un fidele récit de la discussion Bréhier-Gilson a la Société Fran~·aise de Philosophie du 21 mars 1931, au sujet du concept de philo– sophie ch.rétienne. «Gilson était mieux préparé pour le défi en question et il y répondit d ' une maniere plus adéquate» (p. 465). Puissant historien, Gilson a montré l'influence de la philosophie mé– diévale sur la philosophie moderne no– tamment en saisissant la contigence des créatures ( a la différence d'Aristote). Par- mi ses nombreux mérites, il faut signaler son effort pour s'élever au-dessus de sa filiation strictement thomiste et pour comprendre avec sympathie toutes les autres écoles du Moye n-Á.ge (en particu– lier, celle de Saint Bonaventure); d'autre pai1, il a eu raison de reprocher aux théo– logiens de nos décennies leur tendance a assimiler des philosophies actuelles tout a fait étrangeres au christianisme; ces théo– logiens feraient mieux de se ressourcer a leur propre foi et a leur expérience, afin de découvrir de nouveaux concepts (comme le faisaient les Médiévaux). En– fin, Gilson a raison de proclamer l' exis– tence d'une philosophie chrétienne; mais il faut avouer que cette philosophie n'a pas su exploiter toutes les possibilités qu 'offre la théologie; il reste que Gilson a contribué a une nouvelle éclosion de cette philosophie chrétienne (comme Paul Vignaux et Louis Gardet, élogieusement mentionnés par E. Rivera dans son

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